Chapitre 10

Chapitre 10 – La neige éternelle

Au parc Gorki, les statues se dressaient dans le silence, figées comme des gardiennes immobiles. La neige tombait sans fin, recouvrant les allées, les bancs, les arbres nus, jusqu’à donner l’impression que le monde entier s’était arrêté. Chaque flocon semblait effacer une trace, une mémoire, une parole.

Tatiana serra la main de Li Wei, cherchant dans ce geste une chaleur contre l’immensité glacée. — Pourquoi ai‑je l’impression que cette neige recouvrira aussi nos souvenirs ? murmura‑t‑elle, le regard perdu dans l’étendue blanche.

Li Wei la contempla, troublé par la fragilité de ses mots. Il sentit que cette neige n’était pas seulement un décor : elle devenait une métaphore de leur rencontre, une menace silencieuse qui pouvait engloutir ce qu’ils venaient de construire. Pourtant, il resserra ses doigts autour des siens, comme pour lui promettre que rien ne disparaîtrait.

Derrière eux, Viktor les suivait. Sa silhouette sombre se découpait entre les troncs enneigés, avançant sans bruit. Mais soudain, il s’arrêta. Ses yeux gris fixaient le couple, une lueur glaciale traversant son regard. Ses lèvres se crispèrent dans un murmure que personne n’entendit : « Elle ne saura jamais qui je suis vraiment. »

Le vent se leva, emportant les flocons dans une danse tourbillonnante. Le parc Gorki devint un théâtre de silence et de neige éternelle, où l’amour et l’ombre se frôlaient sans jamais se rejoindre.